Les agriculteurs de nouveau dans la rue. Sans casse sérieuse (pour l’instant ?) mais toujours aussi décidés à obtenir gain de cause. Mais quoi ? Tout le problème est là. Ils ont d’abord pris pour bouc émissaire la grande distribution, mais il s’avère que cette dernière a respecté les accords décidés sous l’autorité du gouvernement. Il semblerait, et toutes les études convergent, que ce sont les abattoirs qui ne redistribuent la ristourne obtenues des grandes surfaces. Alors pourquoi les agriculteurs ne se retournent ils pas contre les abattoirs ? Mystère. Ils préfèrent revenir à leur «jeu » favori, sortir les tracteurs et exiger du gouvernement des aides.
Il y a un problème de fond aussi bien concernant le lait que la viande bovine. Les filières n’arrivent pas à s’adapter à l’évolution du marché et surtout à travailler la qualité. Entre l’extrême industrialisation à la manière des agriculteurs allemands et la volonté de rester indépendant en se cantonnant à la production, les agriculteurs français ne sont pas armés pour tenir la concurrence internationale. On peut dire que c’est de la faute à l’embargo contre la Russie, mais c’est un épiphénomène.
Pourquoi les agriculteurs qui manifestent ne s’organisent pas sur toute la chaîne de production et de distribution pour réduire les intermédiaires ? Pourquoi ne développent ils pas les circuits courts qui limitent les coûts ? Les questions de fond sont précises et ne peuvent se régler avec un ultimatum lancé à un ministre de venir sur place. Agir ainsi c’est aller vers la facilité, arracher des aides publiques pour continuer à ne rien changer et tenir quelque temps avant que le même processus revienne.
A quoi sert la FNSEA ? Cette puissante organisation syndicale n’est pas capable de porter ce débat de fond et de travailler avec toutes les parties sur les réponses à apporter aux problèmes que connaissent les agriculteurs. La FNSEA sait organiser des actions de jacquerie, ça oui, mais dans l’économie mondialisée qui est la nôtre est-ce la seule réponse à apporter aux problèmes ? Ce n’est pas parce qu’on a une grande gueule et des appuis politiciens qu’on rend service à ceux qu’on prétend défendre.
Toutes les parties prenantes doivent aujourd’hui faire leur examen de conscience, l’Etat y compris bien évidemment. Les solutions à trouver doivent régler le problème du court terme mais aussi envisager le moyen terme pour éviter de retrouver les mêmes causes qui produiront les mêmes effets. Il est facile pour un ancien ministre de l’agriculture de venir « fraterniser » avec les manifestants, alors qu’il porte une responsabilité dans la situation que les agriculteurs connaissent aujourd’hui.
Le plus mauvais service à rendre à l’agriculture serait de faire de la situation un enjeu politicien. Ce que fait la FNSEA depuis longtemps. Les y a qu’à, faut qu’on de Bruno Lemaire sont une insulte au bon sens et contraires à l’intérêt de l’agriculture et donc des agriculteurs. Il y a des responsables syndicaux, des experts des Chambres d’agriculture, des intermédiaires, un gouvernement, et c’est autour d’une table que doit se travailler cette réponse qui permettra à l’agriculture de sortir d’une gestion à courte vue pour entrer dans un développement correspondant à l’évolution du marché. Mais continuer à quémander des aides publiques pour ne pas régler le problème sur le fond, il faut que cela cesse.